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Comment faire pour se stabiliser dans un job quand on a la bougeotte ?

De plus en plus de travailleurs voguent d’un job à l’autre, peinant pour certains à passer plus d’une année dans la même entreprise. Ce phénomène porte même un nom : le job hopping. Mais peut-on réellement construire une carrière en changeant de crémerie trop souvent ? Et surtout, y trouver une satisfaction profonde ?


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Martin a 29 ans, est diplômé d’une grande école, et a déjà trois jobs à son actif… en seulement cinq ans de carrière. “À chaque fois, c’est la même chose : je démarre plein d’enthousiasme pour un projet, puis une fois que j’ai mis en place les process, je m’ennuie. En fait, je n’aime pas le “run”, alors je préfère prendre le large et me lancer dans une nouvelle aventure”, nous raconte-t-il.

Pour Audrey, 32 ans, c’est un peu différent. Ce sont plutôt ses relations avec ses supérieurs qui se dégradent à tous les coups. “J’ai vraiment du mal avec la hiérarchie, et dès que ça se corse, je prends la poudre d’escampette”, nous confie la jeune femme.

Même si leurs raisons diffèrent, une chose est certaine : Martin et Audrey ont conscience de papillonner, et craignent que cela n’entrave leur carrière à long terme. “Autant, je pense que cela passe au démarrage avec les employeurs, car on peut faire passer cela pour une soif de curiosité. Mais à long terme, j’ai peur que l’on me considère comme une personne instable et que cela bloque mon avancement”, s’inquiète Martin.

“On se lance au travail comme dans un loisir”

Consultante & coach PCC ICF senior, Constance Rivier constate effectivement que de nombreux travailleurs, plutôt de la jeune génération, peinent de plus en plus à occuper un poste plus d’une année. “Je l’observe chez mes étudiants. L’impression que cela me donne est qu’on se lance aujourd’hui au travail comme dans un loisir. Si l’on n’est pas satisfait, on préfère immédiatement arrêter”, regrette-t-elle.

Biberonnées aux réseaux sociaux, les nouvelles générations jouissent de multiples possibilités, y compris à l’extérieur du travail. Autant de domaines dans lesquels chacun peut s’accomplir en dehors de la sphère professionnelle. Mais il y a un mais ! “Le problème, c’est que la société de l’instantanéité et de l’abondance crée des attentes court-termistes qui empêchent d’accepter quelconque compromis ou frustration”, poursuit-elle.

Dénouons la pelote de laine

Or, comme le pressent Martin, cette incapacité à se fixer dans un job n’est pas dénuée de conséquences. “Les entreprises ont besoin de talents qui restent plus d’une année. Changer en permanence envoie nécessairement un message à l’employeur. Quant au collaborateur, je pense qu’il est impossible de faire le tour d’un job sans être resté minimum un ou deux ans. En réalité, je considère qu’un cycle normal en entreprise est de deux à quatre ans. Pour moi, cette instabilité perpétuelle est souvent source d'insatisfaction”, affirme-t-elle.

La coach invite donc les serial switcheur à se poser les bonnes questions, à commencer par celle-ci : “est-ce qu’au fond, j’ai vraiment envie de travailler ? D’apprendre ? Est-ce que je cherche à éviter quelque chose, comme ne pas montrer telle ou telle partie de moi-même ? Comment est-ce que je souhaite positionner le curseur sur les quatre pans de ma vie (vie privée et familiale, relation avec soi, domaine professionnel et relations sociales) ? “Il n’est pas toujours facile de trouver une harmonie entre ces quatre domaines. Mais c’est important d’être au clair sur ce que l’on désire prioriser”, relève Constance Rivier.

Une fois que l’on est un peu plus au clair sur la place que l’on souhaite accorder au travail dans sa vie (est-ce un simple job alimentaire ou au contraire la promesse d’un épanouissement ?), il s’agit ensuite de s’interroger sur le contrat que l’on noue envers son entreprise et soi-même afin de se donner toutes les chances que cela fonctionne*. “Le plus important est de se demander en quoi ce job va nous permettre d’apprendre de nouvelles choses. Je crois que c’est cela qui permet de durer en entreprise. C’est aussi ce qui explique que certaines personnes restent toute leur carrière dans une même entreprise, car grâce à la mobilité interne, elles développent toujours de nouvelles compétences*”, poursuit la coach.

“On ne trouve du sens qu’au-delà de soi-même”

Ainsi, certaines personnes changent beaucoup de travail non pas parce qu’elles ne sont pas intéressées par leur vie professionnelle, mais plutôt parce qu’elles en attendent beaucoup. Vient alors la question philosophique du sens que nombre de travailleurs ne parviennent pas ou plus à trouver au travail. “Je pense que tout comme dans la vie, on ne trouve du sens qu’au-delà de soi-même. Si on ne cherche du sens que pour soi, on ne le trouvera jamais. Nous sommes dans une société qui parle constamment d’intelligence collective alors que c’est paradoxalement le soi que l’on met sans cesse en avant”, observe Constance Rivier.

Plutôt que de partir dans une fuite en avant perpétuelle, la coach recommande donc de rester a minima deux ans dans son job (si la période d’essai a permis de lever certains doutes). “C’est d’autant plus important quand il s’agit d’une première expérience afin de pouvoir capitaliser dessus pour ses futurs jobs”, conclut notre interlocutrice.

Alors, avant de faire une nouvelle fois le grand saut : soufflez et réfléchissez !

Paulina Jonquères d’Oriola

Journaliste

Journaliste et experte Future of work (ça claque non ?), je mitonne des articles pour la crème de la crème des médias […]

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